Les écrans et les jeunes
Voici un regroupement d'informations et de réflexions sur le sujet pour informer les parents et les jeunes du risque réel des écrans sur nos cerveaux et donc sur nos vies et prendre au sérieux la nécessité de contrôler et réduire l'usage des écrans et des réseaux sociaux.
Guide parental
L’impact des réseaux sociaux sur la santé mentale des enfants et des adolescents :
L’utilisation des réseaux sociaux par les enfants et adolescents peut avoir divers effets négatifs sur leur santé mentale. Il est important que les parents et accompagnants soient conscients de ces risques potentiels et prennent des mesures pour les atténuer.
Cyberharcèlement :
Vos enfants peuvent devenir victimes de harcèlement, d’intimidation ou d’exclusion en ligne, ce qui peut entraîner des sentiments d’anxiété, de dépression et une faible estime de soi. Le cyberharcèlement peut survenir sur diverses plateformes de réseaux sociaux et avoir de graves conséquences sur le bien-être mental de votre enfant.
Comparaison sociale :
Les réseaux sociaux présentent souvent une version organisée et idéalisée de la vie des gens. Vos enfants peuvent ressentir une pression en se mesurant à des normes irréalistes, ce qui entraîne des sentiments d’incapacité, de jalousie et une faible estime de soi lorsqu’ils se comparent à leurs pairs.
Préoccupations en matière de confidentialité :
Vos enfants ne comprennent peut-être pas pleinement les risques potentiels pour la vie privée, liés au partage d’informations personnelles en ligne. Un partage, des interactions, inappropriés, avec des inconnus peuvent entraîner des problèmes de sécurité et du stress.
Image négative du corps :
L’exposition à des images et à du contenu promouvant des normes de beauté irréalistes peut contribuer au développement d’une image du corps négative et de problèmes d’estime de soi, d’autant plus que vos enfants se comparent à des influenceurs ou à des célébrités, sur les réseaux sociaux.
Troubles du sommeil :
Une utilisation excessive des réseaux sociaux, surtout avant le coucher, peut perturber les habitudes de sommeil. Le manque de sommeil peut avoir un impact négatif sur l’humeur, les fonctions cognitives et la santé mentale globale de vos enfants.
Le syndrome FOMO* :
Les réseaux sociaux présentent souvent des événements sociaux, des rassemblements et des activités dont vos enfants peuvent se sentir exclus. La peur de rater quelque chose peut contribuer à l’anxiété et à un sentiment d’isolement social.
*De l’anglais : Fear Of Missing Out, « peur de rater quelque chose »
Dépendance aux écrans :
Un temps d’écran excessif, y compris le temps passé sur les réseaux sociaux, peut contribuer à des comportements addictifs, conduisant à négliger d’autres activités importantes, telles que les devoirs, l’exercice physique et les interactions en face à face.
Pression de conformité :
Les plateformes de réseaux sociaux peuvent parfois créer une pression sur vos enfants pour qu’ils se conforment à certaines tendances, comportements ou opinions. Cette pression peut contribuer au stress et avoir un impact négatif sur leur bien-être mental.
Exposition des jeunes aux écrans : les recommandations du rapport remis au Président de la République
Avis de Sylvie Dieu Osika, pédiatre, auteure de " L'enfant-écran : Comment échapper à la pandémie numérique ? "
Transcription de l’interview de Sylvie Dieu Osika, pédiatre, recueilli par Lou :
Regardez un bébé qui regarde un écran, il est comme ça (La pédiatre écarquille les yeux). Il ne bouge pas, son visage est figé, ses yeux sont comme ça (yeux écarquillés). Parce qu’il a un nombre de données qui lui arrive à toute vitesse, il est sidéré. Et qu’est-ce qui se passe pendant ce temps-là ? Son cerveau ne marche pas. Il ne se passe rien !
Je suis Sylvie Dieu Osika, je suis pédiatre, mon mari est également pédiatre et nous avons écrit ensemble un livre : « L’enfant-écran, Comment échapper à la pandémie numérique ? »
Parce qu’il faut vous informer, il y a un problème : les écrans, c’est nocif pour les bébés. Il va y avoir un tas d’impacts, alors on peut faire la liste, elle est longue.
Allons-y pour la liste ?!
Il y a des retards de langage, voire des absences de langage, les enfants ne peuvent pas apprendre à parler parce qu’ils n’ont pas d’interactions avec l’autre, avec l’humain.
Il y a des troubles du sommeil très importants et quand on impacte le sommeil, on impacte énormément de choses : la mémorisation, la concentration, l’humeur, un impact même sur la motricité globale, les enfants ne bougent pas suffisamment, et puis il y a même un impact sur la propreté, les enfants sont propres de plus en plus tardivement.
Ça touche tous les points de développement d’un enfant et ça dès le plus jeune âge.
Alors le profil type c’est souvent le premier enfant, parce que les papas, les mamans ne savent pas trop bien comment un enfant se développe, à quel âge il doit parler. Et un facteur de bascule que je trouve très souvent quand même, c’est une deuxième grossesse très rapprochée. Dans tous les cas, quand on n’a pas la bonne information, suffisamment précocement, on se fait avoir.
Et donc les parents au fur et à mesure, vont laisser un quart d’heure pour manger et puis on mange quatre fois par jour. Et puis, ils vont donner parce que l’enfant s’ennuie un peu. Et puis là, il a fait une colère, « oh ça l’a calmé ! » « Oh et puis après tout, j’ai entendu que c’était peut-être éducatif ». Et on arrive à 1h, 2h, 3h, 4h, 5 heures d’écran par jour.
Et ça continue, quand je les vois à 3 ans, ils sont à 6 ou 8h par jour. Et du coup, on en oublie qu’un petit enfant, pour se construire correctement, il a besoin des interactions, il a besoin de cette disponibilité du parent pour son enfant. Si vous, papa, maman, vous êtes sur votre iPhone, votre regard est porté sur un écran, vous ne regardez pas votre bébé dans les yeux et si vous ne le regardez pas dans les yeux, votre bébé ne comprend pas les messages qu’on est en train de lui dire. Et si ça se répète plusieurs fois par jour, il va pleurer ou il va être dépressif, il va être mou, il ne va s’intéresser à rien et il ne va surtout pas apprendre le langage.
Et là actuellement, ce qu’on vous donne, à vous les adultes, ce qu’on donne aux ados, ce qu’on donne aux enfants et ce qu’on donne aux bébés, ce sont des programmes addictifs par nature. On capte l’attention des bébés en leur mettant des images qui vont à toute vitesse, des sons stridents, des sons particuliers. Et figurez-vous quoi ? C’est étudié pour que l’enfant ne lâche pas ! Et quand on va lui enlever, il va pleurer. Quand on va lui remettre, il va être rassuré.
Il faut le préserver le bébé, il a trop de choses à apprendre quand il est tout petit. Donc, la priorité c’est de se prendre la tête : quand mon bébé est éveillé, je n’ai pas d’écran, je ne regarde pas mon téléphone, je le retourne. Idéalement, la télévision en arrière-plan est éteinte. Et si je dois répondre à un SMS, ben oui j’y réponds, mais je fais attention à ne pas aller scroller ensuite sur les réseaux sociaux et autres. Parce que là, c’est là où les choses vont totalement dérailler.
Et le plus grand, il est pareil, le 5/6 ans, il a envie qu’on le regarde et qu’on joue au UNO avec lui pour de vrai et pas en répondant à 10 SMS et en faisant autre chose.
Alors, est-ce qu’il faut bannir les écrans de notre vie à partir du moment où on devient parent ?
Oui, jusqu’à 3 ans.
Idéalement avant 6 ans, le moins possible.
Avant 3 ans, zéro !
Entre 3 et 6 ans exceptionnellement !
Et pour faire quelque chose d’assez simple, surtout quand on a plusieurs enfants, c’est : Pas les jours de semaine.
C’est simple, c’est carré. C’est la semaine, on a eu école, pas d’écran !
« Tu t’ennuies ? Ennuie-toi ! Ce n’est pas grave, tu vas voir, tu vas faire autre chose, il y a plein de jouets. Tiens d’ailleurs, tu n’y joues jamais ».
S’il n’y a pas d’écran, je peux vous assurer qu’il ira chercher la feuille et les crayons et qu’il finira par faire des choses.
Et puis 3 temps sans écrans, qui sont vraiment à préserver dans la vie familiale :
Pas d’écran pendant les repas.
Pas le matin parce que quand vous mettez un enfant devant un écran le matin, il consomme toutes ses batteries quasiment.
Et puis le dernier point très important, c’est de préserver le sommeil, donc pas 1h avant de dormir.
Qu’est-ce que vous attendez de la part de l’Etat ?
J’attends qu’il se réveille et ça fait des années que l’Etat devrait se réveiller. Franchement, s’il y a des gens à protéger, c’est bien les enfants qui sont vulnérables par nature. On est en train de créer du handicap parce qu’on crée des situations où l’enfant n’apprend rien pendant ses 3 premières années au domicile, face à un écran avec un parent connecté qui n’est pas informé.
Donc, je pense qu’il faut légiférer. Ça veut dire, qu’il faut donner un âge même si ça choque : Pas d’écran en présence d’un enfant avant 3 ans. Dans les crèches, les nourrices n’ont pas leur écran avec elles, eh bien les parents c’est pareil, ils n’ont pas leur écran avec eux.
On est parent, on est les protecteurs de nos enfants.
Ce n’est pas facile. Moi je trouve que c’est dur la vie actuelle des parents, elle n’est déjà pas facile en général. Vous avez l’éducation du monde réel et en plus vous avez l’éducation du numérique. Deux, waouh, c’est dur !
Avis de Sylvie Chokron, neuropsychologue. Les capacités de contrôle mises à mal
Transcription de l’intervention du 3 avril 2025, sur la chaine Public Senat, de Sylvie Chokron, neuropsychologue et directrice de recherche au CNRS :
« C’est clair que prendre un livre, ça nécessite de choisir le livre, de décider où on va aller regarder dans le livre, de se souvenir de ce qu’on a lu la dernière fois, de garder en mémoire ce qu’on est en train de lire pour comprendre la suite, de raisonner, d’imaginer, pourquoi l’auteur a écrit ça, de se représenter les personnages, éventuellement de décider si on est d’accord ou pas.
Et quand on lit, notre cerveau a le temps de faire ça. Il a le temps de raisonner, il a le temps de mémoriser, il a le temps de faire attention, il a le temps même ensuite d’interagir avec d’autres personnes qui ont lu ce livre.
Quand vous êtes sur TikTok ou un autre réseau social, tout ça, c’est complétement impossible. En fait, votre cerveau au lieu d’avoir une grande boucle qui va faire intervenir toutes les régions cérébrales - la perception, l’attention, le raisonnement, le langage, la mémoire, le jugement critique - toutes nos fonctions les plus élaborées, en réalité, quand vous êtes sur TikTok, vous avez un tout petit circuit qui est : la perception, les émotions de base et le plaisir. Et ça s’arrête là. Il n y a pas de raisonnement, il n’y a pas de mémoire, il n’y a pas de jugement critique. Et surtout, ce qu’il n’y a pas, c’est du contrôle. Puisque justement, vous ne pouvez pas contrôler ce que vous faites.
En fait, on a l’habitude de séparer la problématique des écrans des autres problématiques, des addictions en général, à l’alcool, aux drogues, etc. Sauf qu’on ne peut pas se voiler la face : passer 10 heures par jour sur un outil qui n’exerce pas nos capacités de contrôle, c’est prendre le risque de ne pas développer ces capacités de contrôle, parce que ces capacités arrivent à maturité vers 18-20 ans. C’est pour ça que la majorité est à 18 ans dans la plupart des pays. C’est parce que notre lobe frontal qui contient nos capacités de contrôle et notre jugement critique arrive à maturation à cet âge-là.
Sauf que si vous passez 10 heures par jour sans exercer ces capacités, ces capacités ne vont pas maturer. Mais le problème, c’est que vous en avez besoin dans la vie de tous les jours. Vous en avez besoin pour inhiber des comportements qu’il ne faut pas avoir, par exemple, taper quelqu’un dans la rue. Vous en avez besoin pour inhiber des comportements addictifs, pour vous contrôler. Vous en avez besoin pour raisonner, pour le jugement critique, pour tout. Et donc du coup, ce n’est pas simplement, qu’on prend un risque en étant sur TikTok pour notre attention ou simplement pour ce qu’on ne fait pas pendant qu’on est sur TikTok, on prend un risque parce que toutes ces capacités-là ne se développent pas et qu’on en a besoin dans la société et pour les apprentissages.
Donc en terme de santé mentale, on sait aujourd’hui qu’il y a eu une étude qui a montré que si on réduit uniquement de 10 minutes Snapchat, 10 minutes Facebook, 10 minutes Instagram, soit 30 minutes par jour, ce qui n’est pas grand-chose, on réduit de manière significative l’anxiété, la dépression et le risque suicidaire chez les jeunes. Donc, on a la preuve maintenant que ces outils-là ont un effet délétère, et sur la santé mentale et sur les addictions en général et pas simplement aux écrans.
Emission Arte : Smartphone interdit !
Emission Arte : Une cure de détox numérique
https://www.youtube.com/watch?v=Vd4CbcrCu40
Expériences en Allemagne et en Pologne.
Quoi faire à la place ?
Pour les tout-petits : jouer avec eux, leur chanter des comptines, leur racontrer des petites histoires, souvent les mêmes. Leur proposer des jeux de leur âge :pâte à modeler, tour à construire, cubes, puzzles des tout-petits, jeux d'encastrements, jeux symboliques, petits livres à toucher,...
Pour les plus grands, jouer encore avec eux, les mêmes jeux que précédemment, adaptés à leur tranche d'âge. Leur proposer de dessiner, peindre, y compris avec les doigts, les mains. Sortir tout le matériel sur une nappe et organiser un moment de créativité. Puzzles, perles, jeux de construction, jeux de société, jeux de cartes. Jeux de balle, ballons, ... si vous avez peu de temps disponibles, soyez dans l'interaction pendants que vous faites une tâche domestique ou faites les participer en leur proposant.
Pour les jeunes ados, les mêmes jeux que précédemment adaptés à leur âge, puis : aller visiter des musées, des expositions, proposer des moments de créativité : modelage de la terre, dessin, peinture, collage, sport collectif en plein air, demandez-leur s'ils veulent vous parler d'un sujet qui les intéresse,...
Ces petites listes ne sont pas exhaustives, elles ne sont qu'une ouverture d'idées pour en faire émerger d'autres. Le tout est de retrouver du plaisir à passer du temps avec son enfant et à jouer avec lui.
Jouer, créer, expérimenter, tester, écouter, ...
Livres
Faire face à : L'addiction aux écrans
Smartphone, internet, réseaux sociaux
De Sébastien Herry, chez Ellipses
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